Epistémologie de la psychanalyse
Théorie et pratique de la psychanalyse
L'incorporel
au sein du corps de la lettre
René Lew
La structure du lecton, sur laquelle nous sommes restés l’an dernier, participe du déchiffrage du symptôme dans la cure.
Dans l’optique de réétayer le Kultur-Über-Ich de Freud, et cette fois plus que l’an passé, nous envisagerons la pratique de lecture et d’illecture de la psychanalyse comme des choix politiques, ou même : des choix à connotation politique.
Pour ce faire, nous poursuivrons sur la lecture du livre Derrida-Lacan d’Isabelle Alfandary, dont nous nous étions quelque peu éloignés.
Surtout je viserai à formuler de manière plus serrée l’organisation littorale de la lettre. Je n’imagine pas que ça puisse passer par une autre voie que la logique ― ou du moins des logiques hétérogènes, imprédicatives qui fondent l’inconscient.
Grâce à elles, nous verrons à redéfinir position du sujet et symptomatique dans des termes permettant de travailler de manière neuve « lalangue », sachant que Lacan n’est pas allé assez loin dans cette investigation.
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Voici le point où je suis arrivé sur la fin de l’année 2023-2024
Récursivité, exprimable et représentance
Je fais fond sur les modalités pour donner un exemple, parmi bien d’autres, de logique(s) imprédicative(s).[1] Ces logiques constituent proprement l’inconscient en l’opposant à la conscience structurée par la (les) logique(s) prédicative(s) standard.[2]
Depuis l’inconscient, les logiques imprédicatives, donnant la morphologie de la structure signifiante, interviennent aussi, mais alors négativement, dans les effets pathologiques qu’en supporte le sujet lorsque leur incidence se trouve ― d’une manière ou d’une autre (c’est-à-dire encore modalement) ― barrée. Je considère en effet que la pathologie est plus le fait de la conscience que celui de
l’inconscient. Il n’empêche que les relations inconscient-conscience participent de toutes les positions de sujet. Le meilleur exemple est celui du rationalisme morbide que je prends comme un phénomène psychotique de base : les vérités assénées n’y sont plus infléchies par les modalités. Que Lacan ait indiqué que l’inconscient est structuré comme un langage, n’a donc rien d’étonnant.
Dans cette optique je voudrais donc souligner un point, jusqu’ici laissé dans l’ombre, tout comme ses conséquences. C’est que les modalités se fondent de la récursivité, et celle-ci est à entendre comme à la fois nécessaire et obligatoire dans l’élaboration de la signifiance et son passage au réseau signifiant dont s’organise le sujet. Je dis par là que la récursivité induit les modalités du fait de sa participation aux modalités que je pense basiques du nécessaire et de l’obligatoire.
Et, dans la construction du langage par l’enfant (laquelle n’est pas une simple acquisition), les modalités dominent et impliquent les propositions qu’elles précèdent. Une modalité, quelle qu’elle soit, participe du rhématique en infléchissant le propositionnel thétique. Or le rhème est une fonction, par excellence en intension, alors que la proposition, apophantique, objectalise. Disant cela je souligne que le rhème, proprement intensionnel, met en jeu la récursivité. Je rappelle que la récursivité est le mode d’organisation d’une fonction qui ne se définit qu’en s’appuyant sur ce qu’elle est censée produire, donc d’une manière rétrogrédiente, selon un après-coup anticipatif par sa rétrogrédience.
Et disant qu’une inflexion anticipe sur la proposition qu’elle modalise, j’en souligne le caractère rétrogrédient. Ce faisant c’est l’intension, de ce fait récursive, qui s’en trouve soulignée et fondée. De manière progrédiente, je dirai que le propositionnel anticipe sur le modal, soit plus exactement qu’il vient en rétroaction sur son
conséquent, quant à celui-ci véritablement anticipatif. C’est de cette façon que l’on peut soutenir que la récursivité fonde la modalité. Les modalités sont de ce fait tributaires de l’hypothétique, surtout à anticiper le propositionnel qu’elles sont censées uniquement infléchir, et qui s’avère supposé dans cette situation.
Comme la psychose se détermine, entre autres interventions causales (ou plutôt conditions), de délaisser les modalités, elle ne prend pas à son compte (ou plus exactement au compte du sujet) la récursivité, justement parce que celle-ci spécifie l’intensionalité des fonctions signifiantes. C’est aussi pourquoi les psychoses se situent sur le versant prédicatif, objectal, extensionnel, de la structure, autrement dit sur le versant de l’Autre objectivé et du corps.
Mais c’est surtout que la récursivité, opérant comme imprédi-cativité(s), utilise le littoral de la lettre, telle qu’elle se marque (ou tel qu’il se marque) comme un exprimable, un lecton, soit un incorporel. En effet, dans la psychose, la corporéité domine : celle directe du schizophrène, celle principielle dudit automatisme mental, celle des sensations dont pâtit le paranoïaque et dont il étaye aussi son interprétation et ses convictions.
Et si j’ai dit « se marque », c’est par excès : précisément le littoral ne se marque pas, sinon à disparaître comme littoral au profit du caractère. Mais, s’il subsiste comme tel en opérant, c’est précisément grâce au lien récursif œuvrant au travers des incorporels par lesquels il se présente.
J’insiste donc ici sur le lien de l’exprimable — soit, pour fixer les idées, la lecture[1] (mais le lecton dépasse la lecture) de ce qu’il y a à savoir dans tout discours d’un sujet, y compris psychosé —, j’insiste
sur le lien de l’exprimable avec la récursivité. Et la première difficulté tient à la saisie de cet autre lien entre l’exprimable et l’exprimé.
Comme ce lien de l’exprimable avec la récursivité est aussi celui de l’intension aux extensions, ce « littoral de l’exprimable » est le fait de la Vertretung[1] de Frege. Et je considère que cette représentance-là opère dans les deux sens : pas uniquement d’intension en extension (l’intension étant « représentée » par une/des extension/s), mais aussi par déconstruction des extensions au profit d’un renouvellement de l’intension de la récursivité. Autrement dit, une fixité psychotique au niveau des extensions est une rupture dans l’asphéricité de la Vertretung : ne subsiste que le lien d’intension en extension(s), mais coincé dès lors au niveau de celle(s)-ci, au détriment de la remise en marche de la récursivité intensionnelle. Une fixation sur le littoral est ce qu’on nomme un « état limite ».
La Spaltung freudienne (distinguée de celle de Bleuler qui est une schize radicale dans la structure du sujet) est ainsi dialectique et constitue le passage réversif de fonction en objet. Elle est l’effet de la récursivité ainsi conçue : les logiques imprédicatives sont tributaires, sinon de leur absence d’ontologie, du moins de la relativité de celle-ci. Y supplée une hypothèse dont et l’organisation même et ses conséquences constituent la signifiance comme effet de supposition (Annahme) introduit dans le domaine d’expression intensionnelle pour le traduire en extensions, donnant un contenu objectal à l’inconscient qui par après apparaît avoir accepté cette admission (Annahme tout autant). L’ensemble est l’organisation signifiante (incluant hypothèse et acceptation de celle-ci) constituant en propre l’inconscient.
De manière lapidaire : il n’y a de lecton que récursif et de représentance que littorale. C’est en quoi Lacan privilégie le savoir textuel dans la psychanalyse.
R.L.,
le 26 mars 2024
[1] Lire R.L., Positions subjectives données comme psychotiques, Lysimaque, 2017.
[2] Parmi les logiques imprédicatives on peut noter les modalités donc, les domaines d’interprétation intensionnels, les logiques intuitionistes, et les logiques établies sur les déictiques, les indicateurs de subjectivité, les agencements récursifs, les noms propres, les citations (sinon les interrogations – soit ce que Lacan appelle le « mi-dire »), les conditionnels irréels…Toute construction que je considère comme inductive. Parmi les logiques prédicatives on peut noter la logique des propositions, la logique des classes, la logique des relations. Celles-ci sont déductives.
Dates, horaire, lieu
Les 1er et 3ème lundis du mois hors vacances scolaires, d'octobre à mai, à partir du 7 octobre 2023, à 21h00 précises.
7 bd de Denain, 75010 Paris, code (écrire à la Lysimaque pour obtenir le digicode), interphone, esc. B, 1er étage à gauche.
Participation en présence privilégiée.
En cas d'impossibilité, les codes Zoom sont fournis sur demande.
Parler à ECLAP en 2025
L'amour. La haine
René Lew
Algunas vetas posibles :
La ofrenda al dios oscuro
Temas que tengan que ver con la locura y el poder en las políticas actuales.
Concentración y disolución
Enamoración y odio.
Amor a la castración
Amor al Superyo
Las pasiones del ser odio amor ignorancia
Amor de transferencia
Sujeto supuesto Saber (muy muy importante).
Es importante plantear una reflexión sobre la locura, el poder, la fascinación ante el poder.
Cómo puede ser que la gente vote a genocidas, a políticos que envían al pueblo a la muerte y al hambre?
Hoy podemos hablar de líder al modo de Psicología de las masas?
La guerra.
Mais tout ne pourra être traité.
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Programme (avec Zoom) :
Le 8 mars : l’hainamoration et l’amour pour l’objet ; narcissismes et fonction Père ; quoad matrem et quoad castrationem.
Le 5 avril : la pulsion de mort vs la pulsion de destruction
Le 24 mai : Kültur-Über-Ich ; les passions de l’âme et la pensée
Le 28 juin : transfert, sujet supposé savoir, destitution subjective et désêtre
Traduction simultanée : Ana-Claudia Delgado
Possibilité de participer à la réunion par Zoom :
lien, codes (et autres renseignements) à demander directement à:
encuentroclinicolacaniano@gmail.com